A Aillant-sur-Milleron, comment pourrait-on croire que cette belle église paroissiale Saint-Martin du XIIe siècle avec son choeur en voûtes d’ogives, sa nef en voûte berceau et son clocher remarquable, ait été le théâtre d’un drame qui aurait pu faire partie des heures les plus sombres de notre histoire récente ?
Nous sommes en août 1944. La libération de la France, qui voit la reprise progressive des régions occupées par les forces alliées est en marche. Le 16, Orléans est libérée. Le 25, ce sera le tour de Châtillon-Coligny.
Mais le 22, Aillant-sur-Milleron va vivre des heures tragiques.
Installés à la ferme des Gaujards à la sortie du village, des Allemands ont essuyé quelques rafales de mitraillette d’une voiture de la Résistance. En représailles, ils se précipitent sur Aillant.
Ils incendient la mairie et l’école et les détruisent entièrement. Ils continuent leur sinistre parcours, brûlent encore 3 maisons et se mettent en quête du maire et du curé du village.
Leurs recherches restant vaines, ils saisissent 2 hommes au hasard - M. Leclerc, sabotier, ancien maire et M. Bizot, grand blessé de guerre - qu’ils exécutent sur la route du cimetière en bordure de la ferme du Petit-Moulin.
Leurs corps resteront exposés une journée pour l’exemple.
Poursuivant leur frénésie vengeresse, ils fouillent toutes les maisons du bourg, font sortir les habitants terrorisés et les entassent dans l’église.
On peut imaginer l’effroi des personnes qui n’ignoraient pas que, quelques semaines auparavant, des civils enfermés dans des églises y avaient été brûlés. Notamment le drame du 10 juin à Oradour-sur-Glane : 642 villageois du Limousin massacrés.
Après une nuit d’angoisse, un sous-officier allemand libère les Aillantais. Les Allemands, de retour à la ferme des Gaujards, ont entre-temps fusillé 2 puisatiers : MM. Marcus et Valéry.
Deux stèles ont été érigées à la mémoire des victimes, l’une sur la route de Rogny, l’autre bien sûr à la ferme des Gaujards.
Cette année, ce sera le 70e anniversaire de commémoration de ces heures douloureuses.
Les promeneurs ou les fidèles, en levant les yeux sur le montant gauche du choeur de l’église Saint-Martin, aperçoivent une plaque rappelant les évènements du 22 août 1944. Ils peuvent donc se souvenir. La somme des mémoires individuelles garantira la mémoire collective.
Faits historiques tirés des écrits de Gaston Bracquemont, curé de Châtillon-Coligny.
Article paru dans l’Eclaireur du Gâtinais le 13 mars 2014 ("Anecdotes et Curiosités canton de Châtillon-Coligny").